Arnold (Korndanai Marc Dautzenberg), 18 ans, de retour au pays après une année d’échange aux Etats-Unis, effectue son année de Terminale dans un lycée de Bangkok. Brillant élève, il s’interroge sur son avenir.

Inspiré d’un mouvement étudiant survenu en 2020, le premier long-métrage de Sorayos Prapapan dresse le portrait acerbe d’une jeunesse thaïlandaise en butte à l’autoritarisme des institutions scolaires sclérosées par la corruption et la survivance de traditions d’un autre âge. Pour autant, le jeune réalisateur ne se contente pas d’un simple traitement de sujet social mais formule une véritable proposition narrative et formelle. Ainsi, le titre, dans sa version française, comme internationale, doit autant être interprété au premier qu’au second degré. Arnold est un lycéen de haut vol, ayant remporté une olympiade de mathématiques, mais il est également un jeune homme dilettante qui méprise quelque peu ses camarades et s’adonne à des combines douteuses. A un niveau plus global, le film travaille tout du long des situations ironiques qui n’épargnent personne. En témoigne cette séquence où une mère de famille, inquiète quant à la scolarité de son plus jeune enfant, demande au proviseur de bien l’intégrer au collège de l’établissement… service rendu moyennant une contrepartie. 

Le long-métrage du réalisateur thaïlandais peut se lire tel un manuel de survie en milieu scolaire autoritaire, comme y invite plusieurs plans en insert sur un ouvrage détaillant différents aspects de l’institution étatique. Ces plans, qui émaillent le film, sont suivis par leur traduction en séquences, à l’instar d’une mise en pratique cinématographique de moyens de résistance face à l’administration du lycée. Cette lutte s’opère dans une économie visuelle qui fait la part belle aux prises de vue fixes soulignant, souvent de manière ironique, l’absurdité de certaines situations. Ainsi en est-il d’une séquence d’entrée d’élèves dans l’établissement, l’arrivée de ces dernières étant filtrée par la professeure d’éducation civique qui s’assure du caractère correct de leur tenue et n’hésitant pas à couper les mèches de cheveux rebelles. Arnon, un élève modèle, joue avec brio de la tension entre volonté d’émancipation de jeunes voués à bientôt quitter l’enseignement secondaire, et la nécessité d’une certaine loyauté afin de ne pas compromettre son avenir. Cet antagonisme moral opère à plein chez le personnage principal qui, s’il partage la colère de ses camarades, se garde bien de participer à la protestation lorsque cette dernière se structure. Il atteint son point d’orgue dans l’ultime séquence, puissante de son silence, où cette discipline se trouve récompensée. Récompense amère, la solution est peut-être alors de s’extraire de cet univers délétère. 


Image de couverture © Contre-jour distribution


  • Arnon, un élève modèle (Sorayos Prapapan, Thaïlande, 2022) : lutter ou se conformer ?

    Arnon, un élève modèle (Sorayos Prapapan, Thaïlande, 2022) : lutter ou se conformer ?

    Arnold (Korndanai Marc Dautzenberg), 18 ans, de retour au pays après une année d’échange aux Etats-Unis, effectue son année de Terminale dans un lycée de Bangkok. Brillant élève, il s’interroge sur son avenir. Inspiré d’un mouvement étudiant survenu en 2020, le premier long-métrage de Sorayos Prapapan dresse le portrait acerbe d’une jeunesse thaïlandaise en butte…